La revue Zone critique publie un entretien avec Lou Syrah, autrice du livre Louisa (2020).
Extrait :
Quand on parle d’exorcisme, on pense immédiatement crucifix inversés, prières latines psalmodiées et prêtres en soutane. Pourtant, la pratique de l’exorcisme existe également dans l’islam. Lou Syrah, journaliste indépendante – mais aussi romancière – a enquêté sur ce phénomène et a livré les résultats de ses recherches dans Louisa (éd. Gouttes d’or), un ouvrage à la fois extrêmement personnel et documenté sur certaines dérives de cette pratique religieuse.
En quelques mots peux-tu présenter l’histoire de Louisa à laquelle tu rends hommage dans ce livre ?
Lou Syrah : Louisa est une jeune fille de 19 ans quand commence l’histoire. C’est la dernière d’une famille de 11 enfants d’origine algérienne. Nous sommes dans le Roubaix des années 1990 des usines de briques rouges, des secrets de famille et de l’exil mais aussi de la guerre civile qui saigne l’Algérie et qui rebondit jusqu’en France. Tout le monde vit dans le cauchemar des récits rapportés par les proches mais aussi dans la peur depuis que des groupes islamistes se forment et commencent à agir sur le territoire. Louisa était suivie à l’hôpital pour des problèmes au cerveau. C’était une jeune fille présentée comme timide et réservée, alors quand ses « crises » inconsolables prennent des atours mystiques, on la dit possédée. Elle est prise en charge par un imam brillant franchement auréolé d’une université islamique de Médine. Son exorcisme à lui est loin de l’« islam thérapeutique » traditionnel maghrébin, incarné par les figures des « taleb », les imams guérisseurs qui soignaient par amulettes ou les « chouaffa », les voyantes.
Après cinq heures « de traitement » qui seront comparées à des actes de torture et de barbarie dans un premier temps par la justice, Louisa décède.
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